Angoulême 2024 en salle Ovale : hommage aux autrices et auteurs de BD du Canada

Sélection par Les bibliothécaires - BnF

La bande dessinée québécoise et la bande dessinée canadienne anglophone suivent des parcours différents jusque dans les années 1970. Si une bande dessinée spécifiquement québécoise a toujours existé, celle-ci s’est diluée dans un moralisme religieux après 1945. Quant à la bande dessinée anglophone, hormis une production originale entre 1940 et 1950, du fait d’un embargo commercial sur les magazines américains, elle fut très vite submergée par les séries américaines, puis marquée du sceau de l’immoralisme dans le prolongement de la cabale contre les comics aux États-Unis, dans les années 1950. A partir des années 1970, les grands centres urbains canadiens deviennent des viviers de création de fanzines undergrounds, avant de donner naissance, à partir des années 1990, à une bande dessinée exigeante, d’auteurs à la fois scénaristes et dessinateurs, portée par des éditeurs indépendants comme La Pastèque ou Drawn & Quaterly et dont la qualité égale celle de leurs consœurs européennes et étasuniennes.

Sélection thématique Bande dessinée et roman graphique

Nos derniers coups de coeur

Bix

Bix

Bix met en lumière la carrière de Leon Bix Beiderbecke, l'un des solistes de jazz les plus novateurs des années 1920 aux côtés du légendaire Louis Armstrong. Compositeur et interprète de certaines des oeuvres phares du genre, à ses débuts, Bix a lutté toute sa vie contre ses propres démons tout en affrontant la désapprobation de ses parents et une dépendance à l'alcool. Présenté dans des panneaux essentiellement muets qui reflètent sa qualité de rebelle, d'outsider et son incapacité à communiquer autrement que par sa musique, Bix raconte l'ascension rapide et la chute tragique d'une vedette du jazz, métaphore de la gloire et des risques inhérents à la vie créative.

Un chef d’œuvre dessiné tel un film muet

Comment raconter la vie d’une star du jazz au destin tragique et au sujet duquel les biographies se contredisent ? En écrivant une bande dessinée apocryphe dans un style épuré et dont le prologue affirme : « peu importe qui il était ». Un roman sans paroles où les rares phylactères ne font que mentir. Des strips de cinq cases par page, que seul le rythme de la musique vient bousculer. Du blanc, du noir et du vert de gris pour seuls coloris. Un art du cadrage, du montage  et des expressions du visage qui se déploient case par case comme un film muet. L’art inanimé de la bande dessinée se transforme en un film musical, sur lequel vont danser notre corps et notre âme. Un bain de fraîcheur pour nous plonger dans la vie et le destin dans lequel chacun et chacune pourra se retrouver au détour d’un souvenir.

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Maxiplotte

Il est rare qu'un auteur de bandes dessinées ayant officiellement arrêté d'en faire vingt ans auparavant continue à avoir une influence considérable. Cela devient exceptionnel lorsqu'il s'agit d'une autrice. C'est pourtant bien le cas de la québécoise Julie Doucet, active entre 1987 et 1999, à une époque où les dessinatrices n'étaient pas légion, surtout à se situer sur un terrain briseur de tabous et féministe à la fois. Julie Doucet fait aujourd'hui figure de mythe. Les éditions Drawn & Quarterly à Montréal la rendront célèbre à partir de 1990 avec le comic-book Dirty Plotte, que Julie avait commencé seule en tant que fanzine. En France, c'est en majeure partie à L'Association que l'on doit la publication de son travail : elle est présente dès 1990 dans le tout premier collectif de la structure, Logique de Guerre Comix. Puis ce sera Ciboire de Criss ! en 1995, déjà un recueil de fragments, et quatre autres livres. La conception éditoriale et graphique de Maxiplotte a été réalisée par Jean-Christophe Menu, premier éditeur de Julie Doucet en France et co-fondateur de L'Association, en étroite collaboration avec l'autrice québécoise. Véritable panorama de l'évolution de son travail, Maxiplotte rassemble des travaux réalisés au cours de ses douze années d'activité d'autrice de bande dessinée. S'y déploie une œuvre à la fois subversive, féministe et fantaisiste. Julie Doucet évoque crûment et avec humour la vie du corps – des règles au désir sexuel en passant par les crottes de nez – les stéréotypes de genre, ses expériences de jeune femme, sans oublier sa vie onirique qu'elle relate abondamment. En noir et blanc, les récits s'épanouissent au fil de cases aux décors minutieusement élaborés, peuplées de personnages aussi insolites qu'attachants. Cette anthologie de 400 pages comporte, outre la totalité des histoires issues des recueils Ciboire de Criss ! (L'Association, 1996), Monkey and the Living Dead (L'Association, 1999), tous deux épuisés, et d'autres récits. [source éditeur]

« Habeas papam » : La BD québécoise a sa reine.

Artiste protéiforme et lauréate du Grand prix 2022 du Festival d'Angoulême, Julie Doucet est maintenant reconnue comme une dessinatrice phare de la bande dessinée contemporaine de la fin du XXe siècle. Adepte de l’underground, de « la ligne crade » par opposition à la ligne claire, de l’autobiographie et du féminisme, Julie Doucet est une artiste engagée et sans concession. L’album Maxiplotte que nous vous invitons à découvrir est une compilation récente de ses différentes œuvres et notamment de son journal et œuvre phare Dirty plotte, jamais publié en France. 400 pages pour découvrir ou redécouvrir l’œuvre de cette innovatrice de la bande dessinée francophone.

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The rough pearl

The rough pearl

Artiste en herbe, Adam Kline est enseignant auxiliaire dans une école d'art américaine. Entre ses rêves chimériques, des amis antipathiques, une étudiante qui le drague ouvertement et l'impression qu'un nouvel employé l'épie sans cesse, il perd pied.

 Phénoménologie des mondes possibles et impossibles.

A partir de sa propre expérience, l’auteur nous plonge avec Adam, son anti-héros blanc de la classe moyenne intellectuelle et artistique américaine, dans un monde aux multiples facettes entre réalité brute, fantastique et paranoïa. Tout semble ne tenir qu’à un fil dans sa vie, aussi bien les échecs que la réussite, ou la folie qui le guette. La narration, principalement subjective, rend de manière limpide la lutte entre le monde de l'intime et la matérialité du monde. Une représentation originale aussi de certains thèmes prédominants aux Etats-Unis, comme les réflexions autour du féminisme ou de la race, et qui flirte, avec habilité, entre les contradictions intérieures qu’elles impliquent et le politiquement correct. Un travail très abouti au final, qui renouvelle de manière magistrale le genre américain du roman graphique.

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Marie pleurait sur les pieds de Jésus

Marie pleurait sur les pieds de Jésus

L'auteur livre une interprétation personnelle sur le rôle des femmes dans la Bible. Bethsabée, Ruth, Rahab, Tamar, Marie de Béthanie sont au centre de neuf histoires et les destins croisés de ces icônes viennent souligner les analogies actuelles entre religion et prostitution.

Chester Brown ou l'exégèse dessinée.

Chester Brown continue dans cette œuvre son travail de réflexion sur le rapport de la religion à la sexualité et à la prostitution. Mais il n'interroge pas ici ces thématiques à partir de son histoire personnelle. Il se fait au contraire exégète en questionnant plusieurs passages de la Bible et des Évangiles. Neuf épisodes testamentaires sont ainsi mis en images. Si l’ouvrage se penche particulièrement sur la présence de cinq histoires de femmes dans la généalogie de Jésus par Matthieu, il interroge aussi le mythe d’Abel et Caïn et certaines des paraboles que la tradition chrétienne rapporte à Jésus. Un rare travail de patristicien en bande dessinée, agrémenté d’un important appareil critique à l'appui de ses thèses.

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Fatherland

En 1975, Peter Bunjevac, Serbe exilé au Canada, vit à Toronto avec sa femme et leurs trois enfants. Son épouse, qui soupçonne ses activités militantes contre le communisme, craint pour sa sécurité et le persuade de la laisser partir en vacances chez ses parents. Peter accepte, à condition qu'elle laisse leur fils derrière elle.

Le vertigineux retour sur le passé d’un père, terroriste politique.

Voici un roman graphique autobiographique qui dénote par rapport aux autobiographies introspectives et sans concessions des auteurs américains. Ici l’histoire personnelle croise l’histoire politique de la Yougoslavie, dans un récit en plusieurs parties non chronologiques, où le déchirement familial se construit en parallèle avec l’histoire des guerres des Balkans. Ce n’est qu’à la fin de l’ouvrage, grâce au retour de certaines des images inaugurales de cette oeuvre, mais avec des légendes différentes, que l’ensemble de ces destins se rejoignent pour tenter de donner une explication et un sens au passé de l’autrice. Le style pointilliste en noir et blanc permet de donner une assise matérielle très forte à l’encrage du dessin et sert la réalisation de quelques magnifiques planches en clair-obscur.

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Chroniques de Jérusalem

Guy Delisle et sa famille s'installent pour une année à Jérusalem. Pas évident de se repérer dans cette ville aux multiples visages, animée par les passions et les conflits depuis près de 4.000 ans. Au détour d'une ruelle, à la sortie d'un lieu saint, à la terrasse d'un café, le dessinateur laisse éclater des questions fondamentales et offre une vision différente de Jérusalem.

Sur les pas de Guy Delisle, expatrié pour un an à Jérusalem.

Guy Delisle suit sa femme, membre d’une ONG, à Jérusalem. Dans ce journal de bord, l’auteur narre son quotidien, sa découverte de la ville, de ses habitants, des pratiques religieuses de chaque communauté et vivra parfois des moments surréalistes, décalés. Il nous rend compte de l’atmosphère de la ville à travers ses quartiers, son actualité.
Ce roman autobiographique nous permet d’appréhender la vie à Jérusalem avec distance et humour, l’auteur faisant preuve de beaucoup d’auto-dérision, rendant ainsi la lecture très agréable et enrichissante.

 

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