Carnets de voyages dessinés : partez en excursion avec les auteurs de BD

« Le monde ne devient pas plus beau parce que je le dessine. Je le dessine pour comprendre qu’il est beau. » 

Zep est une star de la BD grâce au succès planétaire de sa série Titeuf et l’auteur de plusieurs romans graphiques qui questionnent notre monde. Ce carnet de voyage, composé principalement de dessins à l’encre et à l’aquarelle, représente la synthèse de cette œuvre. Les textes qui accompagnent les dessins sont d’une grande sincérité et les deux se complètent de manière indissociable comme dans une bande dessinée. L’humour est présent, de même que les détails qui singularisent la vie de l’animal humain, comme la parentalité ou l’amour. Une réflexion sur la vie orne aussi ce voyage. Cet ouvrage nous invite à découvrir une autre facette de Zep : celle du créateur et de ses difficultés à créer ; mais aussi celle du contemplateur de la nature et des vieilles pierres, dans des œuvres où la présence humaine est presque absente.

Impressions dessinées au pays du soleil levant

« Pour comprendre un objet, je le dessine ». C’est peut-être pour cela que le recueil de dessins et de peintures qui composent ce carnet de voyage se nomme japonais. Au-delà de la diversité graphique des œuvres et des techniques employées, des mélanges de photos, d’œuvres de l’artiste, d’objets et d’anecdotes, Emmanuel Guibert se livre comme un simple artisan dessinateur voyageur, un "crobardeur", qui se laisse posséder par les rencontres à partir desquelles, tels des philtres enchantés, va pouvoir se déployer son geste créateur à la rencontre d’un pays et de ses habitants, qui lui opposent leur singularité hermétique. « Je collectionne les connivences, très brèves, sans suite ». L’acte de dessiner devient ici un échange, une tentative, une ouverture où le savoir laisse place au voir.

Des villes nourries de cultures et peuplées d'humanité

Les magnifiques dessins des villes d’Afrique de l’Ouest et de l'Est ont été ici créés par un orfèvre de la plume et de l’encre de Chine, qui émaille ses œuvres de milliers de points et de traits ; l'oeuvre d'un amoureux de l’Afrique, immigré et voyageur. Ce n’est pas tant l’urbanisme, la monumentalité et la sociologie des métropoles qui intéressent l’artiste – pour cela le texte du spécialiste de l’Afrique noire, Philippe David, vous comblera de son savoir – mais la vie quotidienne, l’humain, les coutumes, les cultures, l’Histoire et la nature. Il n’hésite pas pour cela à laisser blanc l’arrière-plan, afin de mieux se focaliser sur ces sujets. Villes singulières, fécondées par les villages et modes de vie qu’elles ont peu à peu recouverts et où se côtoient aussi bien la présence soviétique que coloniale.

 Quand le voyage devient témoignage !

En 2006, pour fuir sa vie américaine, l'auteur s'installe dans la région tropicale d’Oaxaca, pauvre économiquement mais riche d’histoire, d’écosystèmes et de plages paradisiaques. Si ce beau carnet de voyage regorge de dessins qui représentent les monuments, la vie quotidienne, la faune et la flore et même un "odorama", les évènements politiques qui s’y déroulent vont bouleverser les intentions initiales de l'auteur. Plongé dans La Révolte d’Oaxaca, Peter Kuper se fait alors dessinateur politique afin de « contrecarrer la désinformation dont la presse internationale se faisait l’écho », sans jamais nous imposer sa vision et en nous abreuvant de multiples détails colorés. Voici d'ailleurs son épilogue : « ne vous fiez pas à ce que je vous en dis : allez voir de vos propres yeux. C’est la seule façon de réaliser votre toile originale. »

Espace public, mon amour !

Loin de l’image paradisiaque des voyages dans des contrées lointaines et dépaysantes, l’auteur dessine ici principalement les agoras modernes où se croisent les populations de notre planète surpeuplée. Derrière un style graphique homogène, avec des dessins aux contours noirs très prononcés et qui deviennent souvent des aplats, les courts textes descriptifs nous invitent à regarder les détails et la diversité des modes vie à travers le monde. Une invitation à observer et découvrir la singularité derrière chaque groupement humain :  « Mon envie, dans ces dessins, est de raconter un moment et un lieu, d’en faire la synthèse et d’imaginer ce qui se trame derrière. »