Histoire et bandes dessinées

Ce manga historique très documenté et aux dessins minutieux débute lors de l'éruption du Vésuve que Pline l'Ancien observe avec un intérêt tout scientifique (il y laissera la vie), puis remonte le temps. D'abord pour introduire le personnage (fictif) d'Euclès, jeune scribe grec, dont Pline fait la connaissance en Sicile, et qui nous sert de guide, avant de nous entraîner à Rome, où Néron réclame le grand homme. Cette chronologie donne du rythme, tandis que la rencontre d'Euclès avec Plautina, une prostituée qu'il semble connaître, apporte une touche de mystère. On y croise aussi des éléments surnaturels, inspirés par les théories hasardeuses élaborées par Pline, souvent occultées dans les ouvrages modernes qui privilégient l'image d'un scientifique aux intuitions géniales. Tout en respectant l'Histoire, c'est en exploitant les zones d'ombres et les pages méconnues de l'écrivain naturaliste que les auteurs ont composé ce manga avec une grande maestria. (©Hélène Valloteau, publié dans La Revue des livres pour enfants)
 

Mai 1917, le lieutenant Vialatte est envoyé au front, en première ligne. Gravement blessé, il est soigné à l'hôpital militaire du camp de Marly-le-Roi. A sa surprise, le désormais commandant Janvier vient lui rendre visite. Il propose qu'il reprenne son enquête sur les meurtres des quatre femmes, Joséphine, Mariette, Irène et Mathilde.

Comment résister à cette bande dessinée qui évoque l’amitié entre David Niven et Peter Ustinov (qu’on retrouvera tous les deux plus tard dans Mort sur le Nil comme on le voit à l’ouverture de la bande dessinée) durant la seconde guerre mondiale ? Pleine d’humour, elle retrace sur un ton léger et joliment rythmée une opération de diversion qui a réellement existé, menée par Niven et Ustinov : il s’agissait de faire de l’acteur Meyrick Edward Clifton James le sosie du général Montgomery et de l’envoyer en Afrique du Nord parler de plans de l’armée britannique d’invasion britannique de la France par le Sud  pour tromper les Allemands. Parallèlement la bande dessinée nous fait vivre l’ambiance londonienne sous les bombes, faite de folles soirées et de femmes fatales.

Le récit est entrecoupé de lettres, de citations ou de documents originaux attisant sans cesse l’intérêt du lecteur pris dans un maelstrom de couleurs chaudes et élégantes et de rebondissements loufoques, allant du vrai au faux et inversement durant toute sa lecture. 

L'ouvrage a obtenu à juste titre le prix René-Goscinny du meilleur scénario au Festival d'Angoulême 2018.

Ce roman graphique imposant réussit un incroyable tour de force : raconter la genèse et la conception de la bombe atomique, depuis les premiers travaux des physiciens des années 1930 au projet Manhattan, jusqu'aux bombardements d'Hiroshima et de Nagasaki en 1945. Construit comme un roman-feuilleton choral et remarquablement documenté, il donne à voir les travaux des différents protagonistes de la guerre, les tentatives d'espionnage et de sabotage de tous bords, les crises de conscience des physiciens embauchés par les belligérants – notamment Alliés – et les luttes politiques pour imposer cette arme comme couperet « décisif»à la Seconde Guerre mondiale. Dense, mais jamais ennuyeux, il profite du remarquable dessin en noir et blanc de Denis Rodier, proche du style « comics classiques» nord-américain, qui en facilite la lecture. On se surprend à tourner frénétiquement les pages de cette somme, comme on visionnerait sans répit une série télé. Sans doute l'événement « BD» – voire documentaire – de ce premier semestre 2020, par Jonathan Paul (publié dans La Revue des livres pour enfants)

Revivez les grandes courses cyclistes des années 1910 à 1940

Christian Lacroix dit Lax, passionné de courses cyclistes, met en dessin des personnages fictifs, en les intégrant dans les courses bien réelles et légendaires du Tour de France, du Paris-Roubaix ou des 6 jours de Paris au Vélodrome d’Hiver. Il ne se contente pas de retracer les efforts des « forçats de la route »,  il remet aussi en contexte ces événements dans une perspective sociale et historique plus large. Dans des couleurs où domine le sépia, il retrace la douleur de l’effort sportif, l’humilité de ses participants, la cruauté du destin ou de l’histoire comme dans l’Écureuil du Vél’d’Hiv, rappelant qu’entre une course cycliste et un combat de boxe, eut lieu la première rafle anti-juifs au Vél d’Hiv en juillet 1942. 

Une histoire vraie racontée superbement en BD

Dans ce drame historique un peu oublié, une mutinerie hollandaise en 1629, Jeronimus, apothicaire ruiné et assombri par la perte de sa famille, s'embarque comme officier sur le Batavia. Il va progressivement s'imposer aux passagers comme à l'équipage, devenir un tyran et s'emparer du navire, y faisant régner la terreur. Après le naufrage sur les récifs coraliens, Jeronimus devient le responsable des rescapés  et les tue au fur et à mesure pour n’avoir pas à partager les vivres. Un récit dur, une fresque au rendu exacerbé par les dessins et couleurs violentes, torturées, qui soulignent les affrontements et la tension du huis-clos maritime. - Le 20120312 (publié dans La Revue des livres pour enfants. Sélection annuelle)