Roms : voyage au pays des Voyageurs

Ecrire avec toutes les couleurs de son cœur … et de sa culture.

C’est un véritable plaisir que de se plonger dans ces courtes bandes dessinées dans lesquelles s’exprime le trésor perdu, pour nous adultes, de la poésie et de la créativité de l’imagination des enfants. Pleines d’humour, ces histoires nous content aussi le vécu et la conscience d’enfants que les discriminations et le racisme contre les Roms n’épargnent pas, mais contre lesquels s’affirment aussi leur culture. Des couleurs chatoyantes et pleines de vie pour une œuvre d’art pleine de maturité et de malice et à la portée universelle. Une diversité de formes dessinées qu’on se plait à découvrir.

Quand la vie nomade cicatrise la violence adolescente.

Andréas semble tout avoir pour réussir dans la vie : des amis, une mère aimante et des bonnes notes à l'école. Pourtant, il est habité par une rage intérieure que seules les vidéos des autres adolescents qu'il frappe, semble pouvoir éteindre. Une violence froide qui s'insère dans un quotidien naturel pour la plupart des adolescents du collège et redoublée par un graphisme qui ne la distingue pas de la vie ordinaire des protagonistes. Seuls les cauchemars qui hantent Andréas et les aboiements de chiens viennent briser cette banalité graphique de la fureur. Accueilli dans un camp de Voyageurs, l'adolescent va pouvoir, au sein de cette nouvelle vie, réussir à affronter ses démons. C'est au cours des nuits poétiques et étoilées des soirées du camp que l'adolescent va pouvoir absorber les images brutales qui le hantent.

Django Reinhardt, une "rafale de guitares" (Jean Cocteau)

D'origine Sinté, Django vécut son enfance dans la Zone, un ensemble de bidonvilles qui occupaient les anciennes fortifications autour de Paris, et fut l'étoile filante du jazz français. Ce très bel ouvrage, catalogue de l'exposition qui eut lieu à la Cité de la musique à Paris, met en valeur la guitare, instrument iconique du Jazz manouche, dont Django Reinhardt, mort à quarante-trois ans, fut le héraut. Celui qui introduisit le jazz en France, fut aussi compositeur et peintre et connut une gloire et un succès international de son vivant, ce que documentent les nombreuses affiches de ses concerts, les documents prêtés par plusieurs collectionneurs et fans du musicien ainsi que les hommages des plus grands artistes de l'époque (dont Jean Cocteau et Jean Dubuffet) qui illustrent richement cet ouvrage.

La photographie est enfant de Bohème !

Josef Koudelka, membre de l'agence Magnum et grand reporter multiprimé, commença sa carrière de photographe en documentant la vie de bohème qu'il menait en partie, dans les débuts de sa vie d'adulte, en compagnie des Gitans tchécoslovaques. Cet hommage semble déjà contenir la spécificité d’un regard poétique, altruiste et nostalgique sur l’archéologie d’un monde qui disparaît petit à petit sous l’action de l’histoire et de la politique. Chacun des clichés de cet ouvrage est une tranche de vie qui semble comme par magie nous raconter toute une histoire et en appeler de nombreuses autres, nous obligeant à reproduire mentalement le film qui en découle. L’ensemble rend hommage au pouvoir de la photographie : dire le réel, la vie, l’histoire des civilisations humaines, sans qu’aucun mot ne soit écrit ni prononcé.

« Seigneur ! On est bons qu’dans la musique et les bandes dessinées ! »

Contre l’oubli de l'histoire, voici un récit à visée ethnographique de l'instituteur et ami d'une famille de Voyageurs ; un récit dans lequel les Voyageurs sont les acteurs et les narrateurs de leur propre histoire. Une occasion de faire vivre une culture, mais aussi de montrer au quotidien le poids des persécutions administratives, des drames et des conditions de vie très difficiles que celles-ci engendrent. L’occasion de montrer aussi les stratégies de lutte et de survie déployées par les voyageurs contre le contrôle administratif toujours en vigueur, qui impose, une hérédité de statut. Si la plupart des pages semblent crayonnées de manière simple au fusain et offrir un découpage classique, le dessin se fait parfois plus dense, encré, abstrait et mouvementé, pour exprimer les temps forts dans lesquels s’exprime le destin.