Journée internationale pour l'élimination de la discrimination raciale : 21 mars 2023

Noir et Blanc ou Blanc et Noir ?

Une plongée au cœur de l’épistémologie raciste du XIXe siècle, lorsque le rationalisme scientifique, naviguant entre le darwinisme naissant et la théorie délirante d’une origine génétique de la hiérarchie des races de Gobineau, donne naissance à des explorateurs à la recherche des supposés « Niams Niams », ces « humains qui ont une queue », chaînon manquant de l’évolution entre le singe et l’homme. Une découverte des stratégies et des luttes de ceux qui refusèrent de subir le racisme sans se battre. Une mise en parallèle du racisme et des discriminations que subissent les femmes, comme une constante de l’histoire humaine. Le jeu sur le noir et le blanc, avec de nombreuses inversions de couleurs, interroge, relativise et au final anéantit le pouvoir discriminant que l’histoire a conféré à la mélanine.

Le procès graphique radical et sans concession de l’apartheid et du colonialisme

Si certaines images sont très dures et crues et se revendiquent du choc ou de Charlie hebdo, il ne s’agit jamais ici de mauvais goût ou de provocations gratuites. À travers la succession d’images ou de courtes scènes, une pensée complexe se donne à voir : « Qui n’ose pas raisonner est un esclave » conclut l’auteur. En se revendiquant de Tadeusz Borowski ou de Thomas Berhnard, Anton Kannemeyer universalise sa vision d’un monde à première vue amoral, sans nous donner de réponses ni d’idéologies prêtes à être consommées. Il nous ramène à notre condition d’humain et nous oblige à nous positionner face à l’innommable du passé, du présent et du futur de l’humanité. 

De quelques nouvelles de la mission civilisatrice de la France en Afrique

D’une lecture aisée et construite comme un récit d’action, cette bande dessinée vous permettra de contextualiser la colonisation française alors à son acmé. Il permet de découvrir la spécificité de la colonisation française en Afrique de l’Ouest qui consiste en une exploitation des ressources naturelles par les compagnies privées avec l’appui des fonctionnaires corrompus locaux et de l’État français et fondée sur la violence et le travail contraint. Il dessine aussi le contexte géopolitique de l’époque et du partage odieux de l’Afrique entre les différentes puissances européennes lors de la conférence de Berlin de 1885. Un bain de culture sur l’histoire de la France et de l’Afrique.

Un symbole pour réparer l’injustice

Comment lutter contre le racisme et les discriminations qui s’abattent sur les Noir(e)s américain(e)s ? En réalisant une bande dessinée au scénario complexe et qui brode un récit fictionnel à partir d’événements et de personnages historiques ? En mettant en parallèle la continuité des discriminations raciales au XVIIIe siècle et au XXe siècle ? En absorbant le lecteur dans une quête vitale et palpitante, dangereuse et pourtant symbolique ? Et si l’étoile noire cachée dans le premier drapeau des Etats-Unis d’Amérique avait vraiment existé ?

La ségrégation raciale américaine n’est pas un mythe !

Le regard d’une enfant ni noire ni blanche offre un point de vue original sur la ségrégation raciale américaine. La diversité des cadrages, des inserts et des jeux de lumière redouble la multiplication des sources d’information et donne à cette bande dessinée un caractère didactique. Nous apprenons par exemple qu’un policier coupable d’un meurtre raciste dans les années 1960 n’est condamné qu’en 2007. L’usage d’un dégradé crayonné en noir et blanc donne au final une unité colorée grise qui vient brouiller les pistes des couleurs et rend encore plus incompréhensible la discrimination des Noir(e)s. Ce dégradé fait aussi écho aux différents types de ségrégation que subissent les immigré(e)s : violent et meurtrier envers les Noir(e)s, remarques désobligeantes et honte intériorisée pour les Latinos.